La définition de la santé psychique la plus couramment utilisée est « … un état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté » Who (2005).
La santé psychique ou bien-être psychologique est une composante de la capacité d’un individu à mener une vie épanouissante par une insertion efficiente dans son environnement et notamment par son aptitude à nouer des relations, les entretenir, mais aussi par sa capacité d’étudier, de travailler ou d’exercer des activités de loisirs. Cet état comprend également la capacité à prendre les décisions ou faire les choix dans sa vie quotidienne sur des questions d’éducation, d’emploi, de logement ou sur d’autres sujets.
Des perturbations dans le bien-être psychique d’un individu peuvent engendrer des comportements mal adaptés qui engendrent une baisse de la qualité de vie dans sa vie personnelle, dans son foyer et dans la société dans laquelle il évolue.
Ces troubles du comportement sont multifactoriels, les facteurs de risques familiaux et environnementaux conservent un poids important et spécifique dans leur explication et dans leur développement Rutter, (2001). En effet, il est clair que les relations parents/enfants jouent un rôle majeur dans le développement des problèmes de comportement, à travers l’expérience et le type de régulation émotionnelle qu’elles permettent Rutter (1995).
Dans l’étude du parcours de vie d’un patient, l’environnement social, l’âge et le temps sont des paramètres essentiels à prendre en compte dans la recherche de l’influence des facteurs de risque sur la santé psychique. Ces facteurs de risque se manifestent à tous les stades de la vie et peuvent fragiliser le psychisme humain qui alors devient plus vulnérable à l’adversité.
Facteurs de risque
Les perturbations du bien-être psychique d’un individu sont généralement issues d’une ou plusieurs chaînes causales. « Ces chaînes comprennent des facteurs de risques génétiques, biologiques, environnementaux et sociaux. L’effet d’un seul de ces facteurs de risques ne peut être entièrement compris en faisant abstraction de celui des autres. La compréhension de la manière dont ces facteurs de risque travaillent ensemble est donc cruciale ». Montreuil et Doron (2009).
Les facteurs de risque qui permettent de classer une personne à risque sont très divers : comportements, habitudes de vie, expositions à la diversité ou dangers environnementaux
comportements, habitudes de vie, expositions à la diversité ou dangers environnementaux.
Garmezy (1994) classe les facteurs de risque en cinq catégories :
1) Facteurs individuels génétiques mais aussi acquis (comme les comportements appris par imitation ou apparaissant suite à la pression des pairs). Catégorie : trajectoire de vie (Symptômes / Traumatisme) et/ou (Autre).
2) Facteurs familiaux (abus physiques ou sexuels, désorganisations familiales, chômage chronique, etc.) Catégorie : trajectoire de vie (Relation paternelle) et/ou (Relation maternelle).
3) Facteurs en relation avec le voisinage et la communauté (par exemple, un voisinage caractérisé par un taux élevé d’abandon scolaire et/ou de délinquance qui menace le bien-être et la sécurité des enfants). Catégorie : trajectoire de vie (Social / Autre).
4) Facteurs en relation avec la ville de résidence ou la somme des adversités – chômage chronique, nombre élevé de personnes sans domicile fixe, habitat inadéquat, infrastructures détériorées, écoles inadéquates, soins médicaux insuffisants – entraînent la perte de l’espoir de pouvoir échapper à cet environnement nocif.
5) Facteurs qui créent une ambiance de négativisme et d’impuissance. Catégorie : trajectoire de vie (Social / Autre).
Facteurs de protection
Rappelons que, pour qu’un enfant se développe d’une façon harmonieuse, il est nécessaire qu’il baigne dans un environnement propice. C’est ce qu’affirme en substance, Lemay (1999) « il est évident qu’un certain nombre de conditions biologiques, socio-affectives et socioculturelles sont absolument nécessaires pour permettre l’épanouissement d’un sujet. Il est tout aussi évident qu’on a besoin, pour se bâtir, d’un accompagnement parental ou substitutif formant à la fois enveloppe, creuset et lieu d’expérimentation »
« On appelle facteurs de protection les attributs des personnes, des environnements, des situations et des événements qui paraissent tempérer des prédictions de psychopathologie basées sur un statut individuel à risque. Ils offrent une résistance au risque. Le terme de facteurs de protection est utilisé comme un terme générique pour les modérateurs du risque et de l’adversité qui améliorent l’évolution développementale ». Werner (2000).
Il est important de souligner que les trois mêmes types de variable (individuelle, familiale et environnementale) agissent sur les facteurs de protection et de risque. Néanmoins, ces facteurs de protection ne sont pas nécessairement l’inverse des facteurs de risque décrits ci- avant. C’est la puissance et le rôle que joue le facteur de protection dans l’interaction avec l’environnement qui le caractérise. En effet, un facteur de protection comme par exemple le soutien d’un parent dans les apprentissages scolaires peut devenir, si le niveau d’exigence devient exagéré, un facteur de risque. Cette situation génère un stress qui entraînera une démobilisation des apprentissages scolaires et un échec. Il est à noter qu’une exigence exagérée pour un enfant particulier ne le sera pas pour un autre. C’est donc le degré d’intensité d’un facteur ainsi que sa modalité d’interaction avec d’autres facteurs, qui caractérisent la qualité de facteur de risque ou de protection Montreuil et Doron (2009).
Enfin Rutter (1987) montre que « la protection ou le risque n’est pas une qualité du facteur en soi du facteur lui-même, mais plus de la façon dont le facteur en question interagit avec les autres facteurs. En l’absence de facteur de stress, des facteurs de protection ou de risque en tant que tels n’ont pas d’impact » Montreuil et Doron (2009).
Les facteurs de protection et de risque constituent une dyade dynamique et complémentaire. « Les enfants qui n’ont pas fait l’expérience de difficultés seront vulnérables plus tard dans leur vie, tout comme ceux qui vivent des stress excessifs » Montreuil et Doron (2009).
La présence de facteurs de risque ne conduit pas inexorablement à l’apparition d’une forme de psychopathologie. Le risque doit être conçu dans une approche probabiliste qui nous invite à réfléchir sur les leviers de prise en charge Montreuil et Doron (2009).
Selon Rutter (1985) : « les facteurs de protection semblent faire référence aux influences qui modifient, améliorent ou transforment la réponse d’une personne face à un événement qui prédispose à une mauvaise adaptation. » Ils sont composés de trois éléments centraux :
1) Ce n’est pas l’effet agréable du facteur de protection qu’il faut prendre en considération, mais bien les qualités positives qu’il entraîne. 2) Le facteur de protection joue un rôle central, même en l’absence de situations pathogènes, « leur rôle est de modifier la réponse à une future adversité plutôt que de stimuler le développement normal » Rutter (1985). 3) Le facteur de protection n’a pas qu’un effet d’amortisseur sur l’événement stressant : il va plutôt conduire le sujet qui y est soumis à développer ses potentialités lui permettant d’y répondre de manière adéquate.
Extrait du tableau de Jourdan-Ionescu C de Montreuil et Doron (2009) qui proposent de diviser les facteurs de protection en deux grandes catégories.
1) Les facteurs de protection qui se situent dans l’environnement externe de l’enfant. Ils se décomposent en deux sous-catégories :
a) Les facteurs socio- environnementaux (réseau amical, lieu de socialisation) :
– Présence d’un riche réseau social de pairs (mesuré par le nombre d’enfants que l’enfant fréquente : amis, voisins, pairs de la garderie ou de l’école maternelle enfants de la paternité). Catégorie : trajectoire de vie (Social / Autre).
– Adultes significatifs dans l’environnement de l’enfant (l’enfant voit régulièrement un adulte autre que ses parents. Cette relation apporte du soutien pour lui). Catégorie : trajectoire de vie (Social / Autre) et/ou (Famille / Amis).
– Aide apportée aux parents pour l’éducation de leurs enfants (les parents ont facilement accès à de l’aide – offerte par des grands-parents, les autres membres de la parenté, les amis, les voisins, les collègues – pour les soutenir dans leur rôle parental). Catégorie : trajectoire de vie (social / Autre) et/ou (Famille / Amis) et/ou (Fonction paternelle) et/ou (Fonction maternelle).
b) Les facteurs relatifs au milieu familial (relations affectives avec les parents…) :
– Structure éducative adéquate (les parents appliquent les normes claires appropriées à l’âge et aux capacités de l’enfant). Catégorie : trajectoire de vie (Relation paternelle) et/ou (Relation maternelle).
– Interaction positive avec l’enfant (les parents vivent des moments agréables avec leur enfant en faisant des activités ensemble, en échangeant avec lui ou en partageant simplement des bons moments quotidiens comme manger ensemble, regarder la télévision ensemble, etc.). Catégorie : trajectoire de vie (Relation paternelle) et/ou (Relation maternelle).
– Climat familial chaleureux (ambiance agréable dans la famille, échanges habituels affectueux). Catégorie : trajectoire de vie (Relation paternelle) et/ou (Relation maternelle).
2) Les facteurs de protection internes à l’enfant :
ceux-ci renvoient de manière générale à l’âge du sujet, son sexe, son niveau intellectuel, ses traits de personnalité et de caractère :
– Habilités intellectuelles supérieures (mesurées par un test d’intelligence ou appréhendées lors d’une entrevue avec un spécialiste qui connaît bien l’enfant).
– Bonnes habiletés sociales (l’enfant a une grande facilité à entrer en contact avec les autres, autres enfants qu’adulte. Il est également capable de maintenir de bonnes relations).. Catégorie : trajectoire de vie (Relations sentimentales) et/ou (Autre).
– Estime de soi positive (l’enfant démontre une grande confiance en lui le Manifeste de l’assurance dans sa conduite). Catégorie : trajectoire de vie (Etat affectif / Traumatisme) et/ou (Autre).
Il est important de conserver à l’esprit que ce concept de résilience s’appuie sur la combinaison de ressources internes et externes et doit s’appréhender sous la forme d’un processus de négociation du risque : les facteurs protecteurs s’opposant au risque et les facteurs de vulnérabilité conduisant à succomber au risque.
Bibliographie
Garmezy, N. (1994). Floreword. In C. A. Nelson (Ed).), Threats to optimal development : Integrating biologicial, psychologicial, and social risk factors. The Minnesota Symposia on Child Psychology. Hillsdale (NJ) : Lawrence Erlbaum Associates, pp. VII-XL;
Lemay, M. (1999). Réflexions sur la résilience. In M-P. Poilpot et al. Souffrir mais se construire. Ramonville Saint-Agne : Fondation pour l’Enfance, Erès.
Montreuil, M., et Doron, J. (2009). Psychologie clinique et psychopathologie. Presses Universitaires de France – PUF.
Rutter, M. (1985). Resilience in the face of adversity. Protective factors and resistance to psychiatric disorder, British Journal of Psychiatry, 147, 598-611.
Rutter M. (1995), Clinical implications of attachment concepts : Retrospect and prospect, J. Child Psychol. Psychiatry, 36, 549-571
Rutter M. (2001), Conduct disorders : Future directions. An afterword, in J. Hill, B. Maughan (eds), Conduct Disorders in Childhood and Adolescence. Cambridge Child and Adolescent Psychiatry, Cambridge, Cambridge University Press, 553-572
Werner,E.E (2000). « Protective factors and individual relilience », dans J.P.Shonkoff et S.J Meisels (dir), Hanbook of Early Childdhood Intervention, 2e éd, New York, Cambridge, University Pres.
Who (2005). Promoting mental health: concepts, emerging evidence, practice. World Health Organization; Geneva, Switzerland.